22 février, 2014

Sur le carnaval vénitien



Cette semaine sur France-Culture et sur France-Inter:

Le carnaval de Venise
Il bat de nouveau son plein jusqu'à Mardi-gras le 4 mars prochain. On parle d'une "tradition millénaire". Il est vrai que les premières traces du carnaval sont attestées dès le Xème siècle et les masques dès le XIIIème. Mais, en dépit des apparences communes, que de différences entre le carnaval du XVIe dispositif-clé dans une vie institutionnelle vénitienne alors à l'équilibre, le carnaval démesuré de six mois de la fin du XVIIIe qui tente de conjurer l'angoisse du déclin et le projet d'abord touristique et culturel d'aujourd'hui !

Mais ne boudons pas notre plaisir. C'est un prodige de plus de la Miraculissime que d'avoir pu réveiller son carnaval en 1980.

Et faisons amende honorable. Si le carnaval est maintenant dissocié des libertés politiques de Venise, c'est que Bonaparte, en 1797, a aboli la Sérénissime. Il a brûlé les ornements du Bucentaure, la magnifique galère-emblème du doge, récupéré l'or et transformé la coque en canonnière. A ce propos, un convoi exceptionnel porteur de bois de grume vient de partir de Dordogne pour rejoindre l'Arsenal de Venise où va commencer la reconstruction de ce bateau légendaire. Juste retour des choses comme des femmes et des hommes à Venise en cette période.

Gilles Bertrand: Professeur d'histoire moderne à l’Université de Grenoble 2

http://www.franceinter.fr/emission-la-marche-de-l-histoire-le-carnaval-de-venise




Sous les masques, le carnaval de Venise
Aujourd’hui 22 février commence le carnaval de Venise. Le carnaval qu’on est convenu de voir accablé par un tourisme écrasant, tel qu’il a été repris pour une renaissance qui remonte à 1980. De bons auteurs disent leur chagrin devant ce qu’ils voient comme une copie dégradée de fastes enfuis. Tel Philippe Sollers écrivant dans son Dictionnaire amoureux de Venise : « Rien de plus faux, parodique et grimaçant que le carnaval moderne. C’est un truc d’écran pour couturiers et sponsors divers. Du bruit, de la laideur, de l’outrance, des masques empilés sur des masques, des contorsions pour la caméra. J’aime Venise, pas sa caricature… »

Caricature peut-être, mais à laquelle on se doit au moins de concéder qu’elle témoigne pour la très longue et passionnante histoire d’un phénomène artistique, social et en définitive politique. Et lorsqu’on restitue à celui-ci sa profondeur temporelle, on découvre sa grande complexité, telle qu’elle s’est définie, déployée d’âge en âge. On mesure combien réductrice est l’image d’un temps de simple transgression au service des plaisirs les plus dévergondés derrière le confort de masques complices.

En un temps, le nôtre, qui a vu les controverses que l’on sait sur le port de la burqa, dissimulant complètement le visage et le corps des femmes qui le portent, s’accentue l’intérêt pour ces masques qui cachent les identités personnelles – mais à quel point, et au service de quelles relations sociales ? Cette interrogation est au cœur des travaux de mon invité, Gilles Bertrand, professeur d’histoire moderne à l’Université Pierre-Mendès-France de Grenoble, à qui l’on doit une récente et très neuve Histoire du carnaval de Venise. Il va nous guider ce matin parmi les tours et les détours d’une très longue aventure multiforme, entraînante, coruscante. Jean-Noël Jeanneney


Bibliographie :

- Gilles BERTRAND, Histoire du carnaval de Venise, Pygmalion, 2013.

http://www.franceculture.fr/emission-concordance-des-temps-sous-les-masques-le-carnaval-de-venise-2014-02-22



2 commentaires:

  1. Bonjour,
    La liberté de ne pas exister avoisine la liberté de communiquer le moins d'informations possibles.
    C'est dans l'air du temps, un mélange de croyances et de réactions.
    Cordialement

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  2. Les jolies vitrines de masques ! Ce carnaval est le plus beau du monde, le plus raffiné, "l'élégantissime". Il y a bien sur toujours de l'iconoclastie, des déguisements sans classe, de la techno où l'on ne devrait entendre que du Vivaldi, mais il suffit de choisir son heure pour aller photographier les dominos. Et là, c'est un enchantement, à l'instar de tes photos.
    Bisous Anna-Livia et bon Carnaval si tu es dans la Sérénissime.

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